Z’étaient rongés par la misère
Ils sont partis par désespoir
Pour trouver la nouvelle terre
Avec dix lir’ dans leur mouchoir
Leur vieux sol était bien précaire
Âpre, pour tous ces va-nus pieds
C’est ainsi qu’ils prirent la mer
Au p’tit matin d’un bel été
D’autres arrivaient de Dublin
De Cork ou du Conemara
Ils n’avaient pas d’autre destin
Sinon de s’en aller là-bas
Ils ont déserté cette ornière
Où s’enlisait leur vieille Irlande
Emportant l’image dernière :
Deux, trois poulains broutant la lande
Refrain :
Qu’ils soient d’Irlande ou de Sicile
Y en a pas un qu’a oublié
Le souvenir de la grande île
Où, dans l’temps, leur papa est né
Portant, dans un sachet jauni
Un peu de terre, un peu de terre
Un peu de terre du vieux pays
En souvenir de la misère
Ça oui ! mais de l’Amour, aussi
Tous, ils étaient bien trop nombreux
Au milieu de leurs orangers
Tous, ils étaient trop miséreux
À l’ombre de leurs chers pommiers
Y avait du brouillard dans leurs yeux
Quand s’éloignait le beau « trois mats »
Leurs tristes cœurs battaient, fiévreux
Et les plus vieux pleuraient tout bas
Ils ont fait maçons, ou dockers
Et ils se sont rompus l’échine
Parfois même ont virés gangsters
Malgré la volonté divine
Avec le temps, ils ont fait souche
Dans l’Ohio, dans l’Nevada
Ont pris parfois un chemin louche
Y a des fois qu’on ne choisit pas
Refrain
Pis, en fin d’compte, les v’là ricains
Beaucoup de gestes, cathos bons teint
Par hasard ont-ils oublié
Le mas, la biquette et le pré
L’églis’ qui les a baptisés
La belle fill’ de leur jeunesse
Et les paroles de leur curé
Les jours sans pain et la détresse
La vie d’là-bas, vers Palermo
Les processions d’Feragosto
La façon d’faire la pasta
Dans leur vecchia Sicilia ?
Les Irlandais, s’bourr’ de coups de poings
Sonnez, bag pipes, dansez la gigue
Sang irlandais ne froidit point
Leurs femmes en portent la fatigue
Beaucoup dorment au cimetière
Sur leurs tombes on a réuni
Un’ poignée de la vieille terre
À celle des États-Unis
Dors, dors, Nono ! dormi, Zia!
Nous vous berçons dans l’Montana
Dormi padre, dormi mamma
Viv’ l’Amérique et l’Italia
Ziti! ziti! Sentite la «ninna nanna»
Dormi padre, dormi mamma
Là dove siete quàgiu
Il dolore non ch’e ne chiu