La lettre à Nicolas

Chez les filles de quinze ans

Moi je viens d’un pays,
Où on n’disait : « Je t’aime »
Y a quelqu’ décennies,
C’était l’évidenc’ même

Que ce soit Jean ou Charles
Sagement attendions
Que le god’lureau parle
(Peur d’passer pour goton !)

Oui, oui, nous attendions
Cœur en feu, sans faiblesse,
La dé-cla-ra-ti-on
De l’homm’ de notr’ jeunesse

Pourtant, j’en connus une
Qui écrivit un jour
Inspirée par la lune
Et par un grand amour

Me fit lir’ son brouillon,
Je lui dis : « c’est tout bon ! »
J’aurais n’aurais osé
Un « mot » si libéré

Lettre à Nicolas

Nicolas
Ma douceur
Mon chocolat
Mon p’tit cœur,
Mon p’tit gars
J’attends l’jour
Où tu m’feras la cour
Car pour moi, c’est près d’toi
Que j’veux vivre l’amour
Nicolas
Les autr’gars
D’notr’ pays
Et mêm’ tous ceux de la France
Peuv’ toujours tenter leur chance
Comm’ d’un clou, je m’en balance
D’leurs effets d’leurs manigances
Alors, voilà : je me lance
Y a bien que toi
Que je vois
Nicolas
Mon grand gars
Ma douceur en chocolat
De résolution, suis riche
De craint’ qu’une autr’ ne t’aguiche

Elle était mignonne, sa lettre, et tellement osée