Flipote, c’était ma Mamie, Françoise Giojuzza. Elle
écrivait des poèmes pour son plaisir, qu’elle publiait les dernières
années de sa vie sur un site communautaire de poésie qu’elle avait
découvert, Ice Tea & Fluminis poèmes.
Au fil du temps, elle s’était fait des amis sur ce site, des amis
proches, avec qui elle échangeait sur la poésie et plein d’autres
sujets.
Quelques mois après sa mort, j’ai entrepris d’éditer ses poèmes sur un
nouveau site, afin d’avoir une typographie plus claire, et de
supprimer les poèmes en double et ceux dont elle n’était pas l’auteur
— mais qu’elle récitait de mémoire à l’attention de ses amis
d’Internet — tout en laissant intacts les poèmes originaux sur le
forum. Voici l’intégralité de sa prolifique production connue.
Sans peur je balance en ligne
Mes mots de mamie indigne.
Bien pis ! je persiste et signe.
J’ai envie d’écrir’ choses délirantes
Le vent qui s’essouffle en nous déchire
Le vent si utile à l’amant, l’amante
Les cœurs qui soupirent, n’ont ce qu’ils désirent
Irons-nous ce soir aux chevaux de bois
Au son des hautbois et du violoncelle
Boire tous les deux le doux vin d’Arbois
Cramponnés, mon cher, tous deux sur la selle
Verrons-nous passer, aux rives de Loire
Des enfants joyeux, venus du passé
Retrouver l’endroit de « Boire et Déboire »
Qui nous envoya chez les trépassés ?
Le vent gémit fort, dans les peupliers
Nos âmes parfois, aimeraient voler
Au dessus des eaux, au dessus des quais
Qui, depuis trente ans, nous ont fait rêver
Adieu, Orléans, adieu, ville aimée
Ce n’est pas demain que nous reviendrons
La Vierge noire, de blés couronnée
Déjà, nous fait signe, et nous la suivons
Les derniers vers sont pour moi une involontaire réminiscence d’un poète dont j’ai perdu la mémoire
C’était une fille, pas tant belle,
Mais si charmante ; à son insu,
Et quand elle entra, Ysabelle
Au cœur du bal, ça s’est bien vu
Car, surtout, elle avait la grâce
Et un sourir’ qu’on n’voit plus guère
Un pied léger pin up s’agace
De voir c’te p’tite aventurière
Capter ici tous les regards
Envoûtés de futurs galants
Tout attendris ; un peu hagards
De croiser des yeux si brillants
Danse, lumièr’, danse fillette,
Ce n’est pas tous les jours quinze août !
Pour chaude et tendre, sur l’herbette,
La douce nuit pour voir le loup !
Mais la petite était si pure
Qu’elle rentra avant minuit
Tant mieux ! tant que le « charme » dure
Tous ont rêvé, cœur ébloui
Parfois c’est le meilleur du fruit
Que son parfum, qui, tôt, s’enfuit
« Ô ! toi seule que jamais je n’eus
Ô toi seule, fille entrevue
Faut-il que je te sente ?
Toi seule qui m’aurais tant plu,
Toi ! toi seule m’est présente
Dans mon cœur, comme un rameau nu »
Il est quatre heures, j’pousse un soupir !
J’aimerai tant me rendormir !
Pour un très doux petit dodo
Bien au chaud contr’ mon gigolo
Vous l’aurez deviné sans doute
C’est mon grand voyou de Biloute
Qu’mon François, et c’est pas triste
A aussi surnommé « l’Artiste ! »
La nouveauté chez ce p’tit con
Bondir très haut, d’un seul rebond
Pour capturer un papillon
Et ron et ron, petit patapon !
Dédié à notre copine angélique
Venez, les amis,
Venez je vous prie
Sur les coups de midi
Manger sans chichis,
Dîner de prestige :
Je veux et j’exige
Tout ce qui aguiche
Le melon et la quiche
À une heure précise ;
Daube bien arrosée
En quatre heur’ mitonnée
Clafoutis de cerise
Et puis crumble aux pommes
Pour les femmes et es hommes
Sur la table, bien mise
Napp’ fraîche amidonnée
Assiettes fleuries
Poivre et sel à côté
Et moutardes aussi
Et des verr’ rutilants
De cristal transparent
Y aura du Silvaner
Et mêm’ du traminer
Et pour la fin du r’pas
Un bon petit caouia
Et pourquoi pas du reste
Un gai p’tit refrain leste
Y a pas de mal à ça du moins je ne crois pas
Et l’curé n’y s’ra pas