« OUAH ! OUAH ! OUAH ! C’EST NOUS QUE V’LÀ !
OUAH ! OUAH ! OUAH !
L’indifférenc’ ne pass’ra pas ! »
Quelle est cette rumeur énorme !
Ce grand fracas dans mon gros bourg
Ces aboiements, qui, sans vergogne,
Envahissent tout le faubourg
Motivée, bruyante au possible,
Une immense foule canine,
Manif toute imprévisible,
Cousin, cousin’ frangin, frangine,
Gueule d’empeigne et fière allure,
Débordant toute la chaussée,
Grande premièr’ quelle aventure !
V’là la manif des canidés
Ils trottent, band’rol’ aux colliers,
Leurs oreilles traînant à terre,
File élégante des bassets,
Son du tambour, joyeux pointers
Les king charles, toute la piétaille,
Les chihuahuas et les cockers,
Bergers belges chiens de bétail,
Hauts lévriers, bulls austères,
Tous, avec belle unité
Scandent des slogans libertaires,
Et formules de syndiqués
Ça ne rigole pas, peuchère !
« Ouah ouah ouah »
Davantage, d’poteaux télégraphiques
Davantage, sur les trottoirs
Pas d’béton, pas de plastique,
Que du bois ! car, c’est notoire,
Le rest’ ne gard’ pas d’odeurs,
Nous privant de nos repères
Nous autres chiens maraudeurs
Pour identifier nos pairs
Celle-là est un’ femelle,
Justement, bien réceptive,
Utile indic’ : la donzelle
Me fait venir la salive,
Celui-là c’est un vieux pote !
Je devin’ c’qu’il a mangé
Sûrement pas d’la compote
P’t’être un rest’ de bœuf braisé,
Ah ! et puis, interdiction
D’nous attacher à la niche,
Ligotés comm’ des p’tits cons
Traités pis que des bonniches !
Halte aux régimes sévères !
Pour sauv’garder l’élégance,
Concours de chiens, on ne blaire,
Le paraître, on s’en balance
Un’ tit’ place au cimetière,
Pour dormir près des patrons,
Quand viendront nos fins dernières :
Ultim’ revendication ! ouah ouah ouah !
En mêm’ temps, sur les balcons,
Toute la gent félidée
Arbore un flegme profond
Un détach’ment indigné