À Orléans

En hommage à ses enfants - poètes que la grande guerre a fauchés

Vers Saint Pierre du Martroi, du côté des Minimes
Ou d’la rue saint’ Catherine, rue du grenier à sel
Ou pas loin du beffroi, dressé, noir vers le ciel
Déambulent parfois sans y être invités,
Jeunes gars trépassés : des poèt’z oubliés

Et tout comme autrefois, les soirs de « rondes folles »
Aux bras de leurs amis, au fil des brumes molles
Bien au d’là des minuits, ils arpentent les rues
Les plac’, les avenues, de leur vieil Orléans
Étonnés vaguement d’être morts à vingt ans

Le vent du soir, un peu, les déshabille
Par les beaux soirs de fête peut-être sont-ils en quête
De la petite fille, qui était leur voisine
Qu’ils ont un peu aimée, sans en avoir parlé
Si vous avez l’oreille fine
Écoutez-les passer
Ils cherchent une trace de leur tendre passé,

Z’avaient l’amour en fleur
Mais n’ont rien osé dire
Ils avaient bien trop peur
De ses éclats de rire

Lorsqu’on a pas vingt ans
On fait le fanfaron
Et le hardi hussard
Quand on est quatre ou cinq
Malins, devant le zinc
Mais devant la Marion
On baisse un peu le ton !
On devient moins bavards
Ils n’étaient pas hardis,
Car ils n’ont rien avoué,
Et leurs secrets jolis
Dans leurs yeux sont restés

Au loin
« Formez vos bataillons ! formez vos bataillons ! »

Chut, soyez en paix, pauvres petits
Vous qui êtes partis
Fleur au fusil