Portrait

En Sicile, Lillo Di Sinatra

Écoutez donc messieurs, mesdames,
C’est le plus grand tombeur de femmes
Et le pir’ bourreau de ces dames !
Regardez-le, donc, qui chemine
À petits pas dansants, légers,
Ses cheveux noirs si bien lissés
À la gomme de mandoline

Un brin de jasmin sur l’oreille
Une chemis’ smart et vermeille
Et dès que se pointe une belle
Veuve opulente ou bien pucelle
Son p’tit œil brillant papillote
Se plisse, fin et grovillote

Il se frise les moustaches
De grands soupirs il s’arrache
Il chante comme un oiseau
Les amoureux chants siciliens
Chant sans peur et sans freins
Si parfois s’prend un râteau

Nous fait la main sur le cœur
L’grand opéra d’la douleur
Simulant crise cardiaque
Ou raison qui se détraque

Au bout du compt’ c’est souvent
L’bel été si chaud aidant
Qu’il obtient ce qu’il attend
Car il est tenace
Le gnasse
Sans mêm’ se ruiner en fleurs
Fait grande fricassée de cœurs !