Du temps qu’on mettait de la brillantine,
Qu’on s’faisait livrer le bois dans les cours
Est-ce que tu te souviens, ma petit’ cousine,
Qu’on les cachait bien, nos tendres amours ?
Derrière l’oreill’, on s’mettait l’« sent-bon »
L’facteur était beau, comme un capitaine
Le petit boucher v’nait à la maison
Et les vieilles dam’ portaient des mitaines.
M’man l’vait sa voilette pour nous faire mignon
Avant de partir au bras de papa
On chipait ses rob’, coiffées en chignon
Tout l’temps qu’ils allaient voir le cinéma.
Nous, on s’amusait avec pas grand’chose
Avant de dormir, deux sur un mat’las.
Ah non ! la soirée n’était pas morose,
Pendant qu’les parents, ils n’étaient pas là.
On dansait le swing, on était « zazou »
On n’avait pas l’droit de voir les garçons
Dont fallait s’méfier, pis qu’le loup-garou !
Mais on les r’gardait par les fenestrons.
À l’épicerie, ça sentait l’café
Le clou de girofle et le thé de Chine
Dans de grandes boîtes noires et dorées
Qui nous arrivaient à hauteur d’échine.
L’pharmacien donnait l’imag’ d’Épinal
Où fallait chercher l’chasseur et son chien,
Qui étaient absents le long du canal !
On tournait l’imag’ car on cherchait bien !
C’était dans le temps qu’on allait en terre
Dans un grand chariot tiré par de ch’vaux
Tout le mond’ suivait jusqu’au cimetière
C’était pas modern’ mais c’était plus beau.
Qu’on les cachait bien, nos tendres amours
Est-ce que tu te souviens, ma petit’ cousine ?
Quand on nous livrait du bois dans les cours,
Du temps qu’on mettait de la brillantine.