La charmeuse d’abeilles

À mon amie d’enfance Mimie, dont le papa était un fameux apiculteur

Y avait Juliette et Nicole
Jeannot, Simon et Rémy
Gars et filles à l’école
D’un gros bourg du Berry

Non, non, non ! dans toute ma jeunesse
N’ai connu Margoton
Plus charmante drôlesse
Que c’tte petit’ Fanchon

Drôl’ de petit’ caboche
Jamais d’beaux cotillons !
Ni bracelets ni broches
De la bonne façon !

Mais vivait dans sa poche
Lézard vert et bancroche
Des fois, clignant de l’œil
Comme un vrai polisson !

Jamais l’on avait vue sa pareille
On bisait jamais
Sa joue blanche et vermeille
Un charme au sol nous clouait.

Son lézard, son sigisbée,
Lui tenait conversations
Qu’elle écoutait, bouche bée,
Mais que, jamais, n’écoutions !

Nous étions pétrifiés
Par leurs rires, leurs caresses
Et le sourire amusé
De cette douce diablesse

Légère, et d’un air narquois
Fanchon arrivait parfois
Suivie d’un essaim d’abeilles
L’école des vraies merveilles !

Qui toujours obéissaient
Bien que tout doux elles braseillent

Elle grandit comm’ les chèvres
Une chatte de gouttière !
Belle des yeux et des lèvres
Bell’ de jour, bell’ de barrière

Ell’ prit un mauvais chemin
Quand, quelques années passèrent,
Jour après jour ; ell’ grandit
Et les vents de la misère
La poussèrent à Paris

Ell’ prit un triste chemin
Et reçut telles raclées
Qu’en mourut, un soir de Juin
C’est ainsi qu’meurent les fées