Ce jeune gars épie sa belle derrière la grille du jardin des chères soeurs
Au beau milieu du jardin
Son beau front est sans orgueil
Son bel œeil noir est câlin
Elle ignore ma présence
Dans la douceur de l’été
Au grand air, dans le silence
Je l’observe, envoûté
Toute entière dans son livre
Elle est loin, ne me voit pas
Et moi je sens mon cœur ivre
Oh ! je sens mon cœur qui bat
Cette fille, ma souveraine
Ma beauté, mon rêve blanc
Ma douceur, ma châtelaine
Mon mirage étincelant
Oui ! c’est la fille que j’aime
« Dispersez vous ! Les manants ! »
Seul un oiseau de Bohême
Vient lui faire compliment
Il se penche et il se pose
Sur sa main de fin velours
La courtis’ comme une rose
Et lui fait plein de mamours
J’en suis jaloux à l’extrême
Moi qui n’ai jamais d’accès
A cette chérie que j’aime
Et que n’oublierai jamais
Les bonn’ soeurs veillent sur elle
Comm’ sur leur plus beau trésor
Qui donc est cette Isabelle
Fill’ de princ’, fille de ténor ?
Je l’ai vue, l’autre dimanche
Assise sur le vieux puits
Oh ! la rondeur de sa hanche !
La douceur de son souris !
J’y ai pris, en catimini
Ses jolis gants de peau blanche
Sur la margelle du puits
Oubliés ce beau dimanche
Pour mon délic’, mon malheur
Moi je dors avec ses gants
Je les baise avec ferveur
Oui, avec emportement
Imprégnés de son odeur
Effluves du Paradis
Ils apais’t un peu mon cœur
Les baise toute la nuit
Que n’est ell’ là, en chemise
Et ses longs cheveux défaits
Rien que cette idée me grise
Ne rêvons pas, s’il vous plaît
Cette fill’ je n’l’aurai pas
Je ne l’aurai pas plus tard
J’n’aurai qu’la fill’ du bougnat
Je bois du vin dans les bars
Mon rêv’ qui le connaîtra ?