Abominable histoire (bref roman)
Ça s’passa du temps d’la guerre
Du temps d’l’Empereur Guillaume
N’en sont restés sus la terre !
N’en sont restés sur le chaume !
C’fut un coup d’fusil « perdu »
Dans l’grand embrouillamini
Des combats et de la nuit
Personn’ s’en est aperçu
J’la voulais fort, Madeleine
Et Thomas était si beau !
J’avais peur qu’il me la prenne
L’désir ? c’est pas toujours beau
Il est resté dans la plaine
Du sang roug’ sus son pal’tôt
Il est resté en Lorraine
Dévoré par les corbeaux
Il reposa en Lorraine
Loin d’chez nous, sans un tombeau
Oui ! et moi j’ai eu Mad’leine,
C’qu’on fait c’est pas toujours beau
Le jour de mon mariage
J’ai mêm’ pas su rigoler
J’avais une sort’ de rage
Qui faisait que d’m’étrangler
De tout ça j’peux pas parler
Ça m’a éloigné d’Mad’leine
J’avais plus l’cœur à l’aimer
Dans mon cœur pourri de haine
J’peux mêm’ pas l’dire au curé,
Il voudrait sûr’ment pas m’croire
J’gard’ce souvenir caché
J’aim’rais m’foutre dans la Loire
Je suis qu’un beau saligot
Le pir’qu’on puiss’voir en France
Qu’a tué son p’tit Toto
Son petit copain d’enfance
J’peux pas me r’garder en face
Quand j’me rase, le matin
Pâl’, debout devant ma glace
Je support’pus ce vaurien
L’crime s’est fait dans la neige
À vingt ans, trop de beauté
L’odeur d’une fill’ sont pièges
Qui vous conduisent au péché
On tire et l’autre vacille
Avant qu’on y aie bien pensé
Le v’là par terre, il a chu !
Et ça fait deux vies d’foutues